Longtemps mis à l’écart des plateaux télé et des grandes radios, le rap français a dû se frayer un chemin en dehors des circuits médiatiques traditionnels. Jugé trop codé ou trop éloigné des normes culturelles dominantes, il a été relégué à la marge malgré son explosion dans les charts. Pourtant, au lieu d’attendre une reconnaissance tardive, les artistes rap ont pris les devants. YouTube, Twitch, Instagram : ces plateformes sont devenues leurs scènes, leurs micros, leurs canaux. Ils y ont inventé leurs propres formats, leurs propres médias, et surtout, leur propre manière de raconter leur histoire. De Grünt à Booska-P, en passant par les initiatives individuelles comme celles de Vald ou Fianso, le rap a tracé sa propre voie dans le paysage médiatique. Ce nouvel écosystème change la donne, non seulement pour le rap, mais pour toute l’industrie musicale.
Le rap, longtemps marginalisé par les médias traditionnels
Pendant des années, le rap a été tenu à distance des grands médias. Trop codé ou simplement jugé incompatible avec les formats traditionnels, il ne faisait que de rares apparitions à la télévision ou à la radio. Et quand il y parvenait, c’était souvent à travers un prisme caricatural, voire stigmatisant.
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Peu de place sur les plateaux télé : Sur les grandes chaînes, les émissions musicales préféraient accueillir des artistes pop, rock ou variété. Le rap était quasi absent des programmes comme Le Grand Journal ou C à vous. Et même lorsqu’un artiste réussissait à s’y faire inviter, c’était souvent en décalage avec son univers, dans des formats qui ne lui laissaient pas la place de s’exprimer pleinement.
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Un traitement médiatique souvent biaisé : Quand les JT ou les magazines d’actualité abordaient le rap, c’était rarement pour parler musique. On l’associait à la violence, à la délinquance ou à la provocation. Les clips étaient analysés à travers le prisme du danger supposé qu’ils représentaient, et les artistes eux-mêmes étaient souvent réduits à des figures polémiques.
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Une place qui se construit progressivement : Il a fallu attendre longtemps pour que certains médias publics s’ouvrent timidement au rap. En 2017, l’invitation de Damso dans Boomerang sur France Inter faisait figure d’exception. Aujourd’hui encore, Planète Rap n’existe en version télé que sur Culturebox, une chaîne peu visible. Ces avancées restent fragiles, et bien souvent cantonnées à des horaires tardifs ou à des canaux secondaires.
Twitch, YouTube, Instagram: comment les rappeurs ont pris le pouvoir médiatique
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YouTube, la plateforme incontournable : YouTube a été la première vraie plateforme où le rap a pu s’exprimer librement. Pendant que la télé fermait encore ses portes à certains artistes, YouTube offrait un espace sans règles, ouvert à tous. C’est là qu’on voit émerger des formats pensés par et pour le rap, à l’image de Rentre dans le Cercle de Fianso : un cercle de rappeurs en freestyle, une scène improvisée, un public qui juge sur place. Surtout, YouTube a cassé le besoin d’intermédiaires. L’artiste publie, le public répond. Le succès ne dépend plus d’un passage en télé, mais d’une connexion directe avec les fans. Et dans cette logique, ce sont les rappeurs qui fixent les règles.
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Twitch, une nouveau scène d’expression en live : Twitch, à l’origine dédiée au gaming, est vite devenue un espace naturel pour les rappeurs. Même public, même génération, mêmes codes. Quand Vald débarque sur le live de Gotaga ou fait des sessions chill avec Itaa95, c’est plus qu’un coup de com’ : c’est du contenu authentique, dans lequel il se montre sous un autre angle. Le DVM Show, mené par Medja, est aussi une réussite : un Planète Rap 2.0 avec freestyles et invités, mais en direct et sans langue de bois. D’autres comme Naza ou Tiers ont même monté leurs chaînes, entre FIFA et discussions. Pour eux, streamer c’est une autre manière d’exister, de partager, de divertir. L’interaction en live avec le chat crée une proximité unique, impossible à retrouver dans les médias classiques. Twitch devient un média plus libre, plus spontané, sans filtres, ni formats imposés.
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Instagram et TikTok, la proximité au quotidien : Si YouTube permet de poster, et Twitch d’échanger en live, Instagram et TikTok créent le storytelling du quotidien. Stories, lives, extraits d’exclus, teasings d’albums : tout se joue ici. On y découvre l’envers du décor, les backstage, les coups de gueule, les moments de vie. Sur TikTok, les artistes testent des sons, lancent des trends, mesurent les réactions en temps réel. Plus qu’une simple présence en ligne, c’est une façon pour les artistes de construire une vraie relation avec leur public. En partageant leurs coulisses, leurs réflexions ou leurs sons en avant-première, ils instaurent une proximité durable et authentique.
Grünt, Booska-P, Raplume : une alternative aux médias traditionnels
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Grünt, la culture freestyle : Créé en 2011, Grünt s’est imposé avec ses sessions de freestyle tournées en une prise, souvent en cercle, dans des lieux bruts. Le média valorise l’authenticité, la technique, et surtout la parole des artistes. En plus des freestyles, Grünt propose aussi des formats longs dans une atmosphère toujours respectueuse et intime.
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Booska-P, la référence grand public du rap : Booska-P couvre l’actu rap au quotidien : clips, interviews, freestyles, reportages. Ce qui fait sa force, c’est sa régularité, son ancrage dans la scène et sa capacité à donner autant de visibilité aux gros noms qu’aux jeunes qui percent.
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Raplume, la voix des fans devenue média à part entière : Né sur Twitter, Raplume a évolué en média multi-format : réseaux sociaux, vidéos, interviews, éditions papier… Ultra connecté à sa communauté, Raplume parle la langue des fans, partage leurs références, leurs émotions, leurs attentes.
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Des safe spaces pour les artistes: Ces médias offrent aux rappeurs un cadre bienveillant, loin des formats imposés par les plateaux classiques. Ici, pas de questions piégées ni de ton condescendant : les artistes sont écoutés, respectés, mis en valeur. Pour beaucoup, un passage dans ces médias n’a rien à envier d’un passage à la télé.
Au-delà des médias : le rap s’émancipe dans tous les formats
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Les cérémonies, une reconnaissance institutionnelle: Les Flammes, cérémonie lancée en 2023, ont été pensées comme un contre-pied aux Victoires de la Musique, trop souvent accusées d’ignorer le rap. En célébrant les artistes de l’univers rap, afro, R&B et plus largement les cultures populaires, Les Flammes offrent une reconnaissance symbolique et légitime, venue de l’intérieur même du milieu.
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Les documentaires : raconter l’histoire du rap de l’intérieur: Des documentaires comme Reines (sur les rappeuses) ou les productions de Booska-P sur YouTube permettent de retracer les trajectoires, les luttes, les contextes. Ici, ce sont les artistes eux-mêmes qui parlent, qui transmettent, qui incarnent. Une façon de reprendre le pouvoir sur le récit.
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